Hôtel Sarkis
16 Feb - 08 May 2011
Hôtel Sarkis, 2011
néon et agrandissement d’une photographie de l’exposition de Sarkis Der Besuch. Das Gespräch. Die Erwartung, Block Beuys, Hessisches Landesmuseum Darmstadt, 2002
coll. de l’artiste
© Mamco ; © 2011, ProLitteris, Zurich
néon et agrandissement d’une photographie de l’exposition de Sarkis Der Besuch. Das Gespräch. Die Erwartung, Block Beuys, Hessisches Landesmuseum Darmstadt, 2002
coll. de l’artiste
© Mamco ; © 2011, ProLitteris, Zurich
HÔTEL SARKIS
16 février 2011 au 8 mai 2011
Hôtel Sarkis est le nom de la présente exposition. Le nom d’une double opération. Rassembler et accueillir la plupart des œuvres de Sarkis qui évoquent des créateurs (musiciens, peintres, cinéastes, philosophes, sculpteurs, écrivains, etc.). Exercices d’admiration, tributs payés, grâces rendues, inspirations revendiquées, amitiés célébrées, ces pièces jalonnent le parcours de l’artiste et leur réunion en réalise un type presque paradoxal de rétrospective. Cette collecte de ses œuvres « hospitalières », proposée par Sarkis lui-même comme motif ou thème, au sens musical du terme, appelait une forme expositionnelle spécifique. Contrairement à son usage jusqu’alors, Sarkis a souhaité en confier la conception au Mamco.
Le caractère généralement installatif de son œuvre implique que chaque nouvelle présentation d’une pièce résulte d’une « interprétation » de sa « partition » initiale. La dimension synchronique de toute exposition et le désir de réactiver ces œuvres profondément mémorielles dans la fraîcheur du présent interdisaient de les héberger dans leur succession chronologique ou leur typologie dédicataire.
D’où le projet de suivre une logique symphonique où l’entrelacs des œuvres dans le dédale des espaces du Mamco évoquerait l’idée d’hospitalité. Le nom d’Hôtel Sarkis suggère que le musée s’est transformé en un hôtel pour les œuvres de Sarkis, un hôtel avec ses chambres, ses halls, ses salons, ses lounges, ses caves, ses couloirs, etc. Comme beaucoup d’œuvres aujourd’hui, celles de Sarkis voyagent souvent, d’expositions en expositions qui sont autant d’escales hôtelières avant le retour à l’atelier où elles semblent se retrouver entre amies et se recharger réciproquement.
Chaque salle du Mamco a été peinte en deux couleurs unies par une ligne rouge qui traverse tout le musée, comme le fameux fil rouge de l’Histoire. Ces couleurs proviennent de diverses sources, picturales (Edvard Munch en particulier) ou décoratives (notamment méditerranéennes), du passé ou du lointain. Elles emblématisent les mondes de Sarkis dont le travail se tient à la bascule du XXe siècle comme ère des catastrophes (guerres mondiales et coloniales, totalitarismes, flux d’exilés, etc.) et du XXIe siècle comme époque de la mondialité (selon le beau mot d’Édouard Glissant). Des surréalistes, il relève l’intense attention portée à l’ensemble des formes issues de la créativité humaine, bien au-delà des seules catégories des arts occidentaux, ainsi qu’une compréhension de l’activité artistique engageant une économie des intensités aux antipodes des visées de carrière et de position sur le marché symbolique ou financier.
Ainsi l’Hôtel Sarkis est-il le théâtre de mémoire, à la fois familier et exotique, générique et singulier, de la communauté invisible de ceux qui se parlent par-delà les siècles et les continents dans les langues imaginaires de leur inquiétude vitale. Son décor est sans envers : il ne cache rien ; comme les photographies qui recouvrent certains des murs de l’exposition, il vaut pour ce qu’il remémore ou arrache à la distance ou la séparation. Il vaut pour ce que vous y ressentirez de notre histoire commune.
Christian Bernard
16 février 2011 au 8 mai 2011
Hôtel Sarkis est le nom de la présente exposition. Le nom d’une double opération. Rassembler et accueillir la plupart des œuvres de Sarkis qui évoquent des créateurs (musiciens, peintres, cinéastes, philosophes, sculpteurs, écrivains, etc.). Exercices d’admiration, tributs payés, grâces rendues, inspirations revendiquées, amitiés célébrées, ces pièces jalonnent le parcours de l’artiste et leur réunion en réalise un type presque paradoxal de rétrospective. Cette collecte de ses œuvres « hospitalières », proposée par Sarkis lui-même comme motif ou thème, au sens musical du terme, appelait une forme expositionnelle spécifique. Contrairement à son usage jusqu’alors, Sarkis a souhaité en confier la conception au Mamco.
Le caractère généralement installatif de son œuvre implique que chaque nouvelle présentation d’une pièce résulte d’une « interprétation » de sa « partition » initiale. La dimension synchronique de toute exposition et le désir de réactiver ces œuvres profondément mémorielles dans la fraîcheur du présent interdisaient de les héberger dans leur succession chronologique ou leur typologie dédicataire.
D’où le projet de suivre une logique symphonique où l’entrelacs des œuvres dans le dédale des espaces du Mamco évoquerait l’idée d’hospitalité. Le nom d’Hôtel Sarkis suggère que le musée s’est transformé en un hôtel pour les œuvres de Sarkis, un hôtel avec ses chambres, ses halls, ses salons, ses lounges, ses caves, ses couloirs, etc. Comme beaucoup d’œuvres aujourd’hui, celles de Sarkis voyagent souvent, d’expositions en expositions qui sont autant d’escales hôtelières avant le retour à l’atelier où elles semblent se retrouver entre amies et se recharger réciproquement.
Chaque salle du Mamco a été peinte en deux couleurs unies par une ligne rouge qui traverse tout le musée, comme le fameux fil rouge de l’Histoire. Ces couleurs proviennent de diverses sources, picturales (Edvard Munch en particulier) ou décoratives (notamment méditerranéennes), du passé ou du lointain. Elles emblématisent les mondes de Sarkis dont le travail se tient à la bascule du XXe siècle comme ère des catastrophes (guerres mondiales et coloniales, totalitarismes, flux d’exilés, etc.) et du XXIe siècle comme époque de la mondialité (selon le beau mot d’Édouard Glissant). Des surréalistes, il relève l’intense attention portée à l’ensemble des formes issues de la créativité humaine, bien au-delà des seules catégories des arts occidentaux, ainsi qu’une compréhension de l’activité artistique engageant une économie des intensités aux antipodes des visées de carrière et de position sur le marché symbolique ou financier.
Ainsi l’Hôtel Sarkis est-il le théâtre de mémoire, à la fois familier et exotique, générique et singulier, de la communauté invisible de ceux qui se parlent par-delà les siècles et les continents dans les langues imaginaires de leur inquiétude vitale. Son décor est sans envers : il ne cache rien ; comme les photographies qui recouvrent certains des murs de l’exposition, il vaut pour ce qu’il remémore ou arrache à la distance ou la séparation. Il vaut pour ce que vous y ressentirez de notre histoire commune.
Christian Bernard