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MARCUS STEINWEG
 

104 DEFINITIONS

Swiss-Swiss Journal N° 50
Thomas Hirschhorn: "Swiss-Swiss Democracy"
CCS Paris 2004 / 05
1 AUTOCONSTITUTION

L’autoconstitution du soi est un acte guerrier, nécessairement violent.


2 SUJET

Le sujet est ce qui ne se laisse pas réduire au statut d'objet, ce qui résiste à la chosification à l’aide des circonstances historiques, politiques, économiques, culturelles. Le sujet est donc toujours sujet d’une certaine résistance, du dépassement de soi relativement à ce qui gêne ou rend difficile ce dépassement. Il est sujet dans la mesure où il tente d’être et de devenir sujet, sujet du devenir-sujet, sujet auto-affirmatif. Le sujet est ce qui s’affirme soi-même en tant que sujet.


3 IMPROVISATION

Dans l’improvisation, le sujet se confirme comme singulier c’est-à-dire autorité autodéterminante. Improviser, c’est prendre tous les risques de la liberté d’autodétermination.


4 PUR DEVENIR

Le soi porte en soi son ombre inconnue, il se dépense au moment d’une autoconstitution destructive. Il conçoit, obtenant une conception d’être soi neuve et inconnue. Il produit des formes inimaginées de vie, de soi et d’être. Il se crée neuf. Il prend le risque, l’audace du pur devenir.


5. DESIR

Le désir détourne son sujet du chemin, de la “ voie de la vertu ” et du “ chemin des raisons ”, la ligne se rompt et le sujet réagit à cette rupture en perdant la mémoire et toutes les particularités, que le souvenir collecte, de telle sorte qu’il est forcé de faire un changement décisif de direction.


6. SINGULARITES

Les singularités sont des VAGABONDS. Elles se meuvent dans l’espace d’indétermination entre le passé et l’avenir, l’origine et l’horizon. Chacun est pour soi le sujet de la production de soi. Dans ce sens, la singularité est sujet autopoïetique.


7. AFFIRMATION TOTALE

La philosophie est un mouvement d’amour. Être philosophe, c’est être en accord. La philosophie prend le risque d’une affirmation sans réserve et irréversible et, de ce fait, une affirmation totale : elle se déclare en accord avec une certaine cruauté du réel afin d’être, au sein du réel, une praxis d’amour et de solidarité avec les victimes de cette cruauté.


8. EXPERIENCE

L’expérience en tant que telle aura toujours été l’événement d’un certain toucher, contact ou blessure.


9. REEL

Le réel n’est premièrement rien d’autre que l’incommensurable. C’est ce qui dépasse toute mesure.


10. DEMOCRATIE

La démocratie est une déconstruction de soi dans la mesure où, dans son cœur, elle protège la loi de son impossibilité. Elle doit se trahir afin de se rester fidèle.


11. BARTLEBY

Bartleby est le nom de cette limite, qui attribue à la mort une impuissance essentielle. Cette mort, qui accompagne tous les refus de Bartleby, pour, au dénouement de l’histoire de Melville, recevoir le corps d’un auxiliaire fantomatique d’écriture comme un cadavre répugnant.


12. AUTONOMIE

L’autonomie, c’est faire les lois soi-même.


13. PHILOSOPHIE

Philosophie signifie ” l’amour de la sagesse ”. Philosopher veut dire aimer. Désirer, vouloir quelque chose. Aimer, vouloir ou désirer le sophon, la ” sagesse ”, la vérité du réel.


14. AUTORISATION DE SOI

Le sujet de l’autorisation de soi se retourne contre le culte de l’impuissance, de la faiblesse, de la dépression et victimisation. Il contredit les éthiques de la larmoyance, de la sentimentalité et du déni de soi. Il combat le RESSENTIMENT et le NARCISSISME, la dictature de la morale, de la conscience, de l’absence d’envie prescrite et de l’indifférence nihiliste. Là contre, il défend la CONSCIENCE DE SOI, L’EMANCIPATION et une certaine FORCE : le COURAGE DE CONSTITUTION DE SOI, l’AVENTURE DE LA LIBERTE et l’AUDACE D’Être HEUREUX


15. L'INVISIBLE

Il y a subjectivité seulement en tant que confrontation avec l’invisible. Le “ Voir ” de l’invisible permet d’abord quelque chose comme la vision.


16. AMIS

La fonction des amis et des complices, des parents et de la fratrie reposera toujours dans leur incapacité à adoucir la solitude du sujet au moment critique de la décision et à pouvoir suivre la folie de l’accélération. Ce sont des alliances douteuses par lesquelles se lie le sujet de la décision.


17. EXPERIENCE

Le sujet de l’expérience est un sujet-mutant, sujet de mutations qui semblent faire de lui quelque chose de nouveau en le rendant objet d’une certaine “ dé-subjectivation ”.


18. INCONSISTANCE ESSENTIELLE

Le réel est plus réel que la réalité. C’est ce qui inscrit une INCONSISTANCE ESSENTIELLE dans le calcul “ réaliste ”, dans l’économie de la doxa. Le contact avec le réel est contact avec cette inconsistance, le point faible de ce système de faits.


19. CONTACT

Il s’agit de contacter le chaos, la diversité indécise préontologique de l’étant. Le sujet de ce contact se dépasse en tant que sujet, qui était jusqu’alors sujet d’une entité fondée ou d’un principe constitutif transcendantal. En dernière instance, être sujet, au sens le plus large et le plus décisif, c’est ce qui dépasse ce concept de subjectivité pour être sa propre autorité à ce dépassement. C’est sa souveraineté spécifique.


20. ODRADEK

Odradek insiste par une présence, qui est absence, disparition ou échappée.


21. POLITIQUE DU REFUS

La “ politique du refus”, de laquelle Bartleby est exemplaire, de l’Être-opposé, est liée avec l’espoir d’une nouvelle universalité.


22. MONDE NARCISSIQUE

Le monde narcissique se partage en ROYAUME DU SIMPLE REVE et en un ORDRE DES FAITS NUS. Les ” idéalistes ” et les ” réalistes ” sont également sujets d’une illusion qui résiste au réel.


23. UNIVERSALITE

L’Universalité n’est rien d’autre que le titre d’un vide formel, qui habite le sujet concret comme un désert ou un océan sans fin. Les Sujets-Singularités sont les sujets de cet océan et de ce désert.


24. CERTITUDE

La certitude n’existe qu’au côté de la doxa, de la saine raison humaine et de ses images du monde et de soi toujours conservatrices.


25. DEMOCRATIE

La démocratie est ce qui pousse à leurs limites les formes démocratiques, les dispositifs établis des fonctions et des opérateurs démocratiques. Elle est ce qui introduit une non-fonction, une contradiction, une aporie dans l’idée du sujet démocratique.


26. SUBJETIVATION

Dans la subjectivation apparaît ce que je nomme sa liberté absolue sans qu’il soit pour autant nécessaire de nier ou de relativiser l’aliénation objective (contextuelle, situationnelle, historique, politique, etc....) du sujet de la subjectivation. Le sujet se constitue en tant que sujet (ce qui est un acte de liberté) dans la dimension de “ matérialité ” réelle et de l’inclusion passive au sein de structures et de contextes structuraux qu’il ne contrôle pas.


27. HETERONOMIE

L’hétéronomie n’empêche pas que le sujet affirme sa liberté d’autodétermination. Il existe ce reste irréductible de liberté pour le sujet en tant que sujet, qui lui permet de s’affirmer comme agent de ses décisions. En tant que sujet déterminé, contextuel, il reste au sujet la liberté de passer au-dessus de sa détermination par autrui.


28. MORALE

La Morale est la discipline pour juger du réel. Elle distingue le bien du non bien ou mal. Etre en accord avec le réel signifie donc un désaccord avec la morale.


29. L'INNOMMABLE

L’innommable est un autre titre du danger. Aucune philosophie, qui se veut responsable, ne se refuse au nom, à la question du nom, qui questionne aussi sur ce que l’on ne peut pas mettre en question. La question de l’origine du nom est également la question de l’origine de la philosophie.


30. UNHEIMLICHKEIT

Le monde des singularités est ZONE D'INQUIETANTE ETRANGETE (Unheimlichkeit) et de non-familiarité, comme on pense l’étrangeté en tant que non-familiarité avec Heidegger. Elle est un monde sans repère stable, sans voie fixe. LE SUJET DE CE MONDE EST SANS ORIENTATION.


31. DOULEUR

Le SUJET DE LA DOULEUR doit s’élever au-delà de la douleur sans l’aiguiser ou la nier. C’est le sujet de l’amour, du contact passionné avec l’intouchable. Il perd et se constitue dans ce contact.


32. ACEPHALIE

Le sujet de l’acéphalie est le sujet hyperbolique, se jetant corps et âmes dans une impossible certitude de soi. Il titube dans le vide infini. Il accélère dans la pénombre. C’est un sujet essentiellement AVEUGLE, non déterminé par la vision.


33. PHILOSOPHIE

La philosophie se dépense dans l’invention d’une NOUVELLE RÉALITÉ. Elle est hyperbolisme du réel.


34. ACCORD

Etre en accord, c’est coopérer avec le réel pour le modifier


35. LEGERETE

La légèreté du sujet de l’aveuglement ne devrait pas tromper sur le fait qu’il est sujet d’efforts particuliers. Le sujet sacrifie la vision pour être sujet dans un sens nouveau. Il quitte les routes connues –zones de lumière et de visibilité – pour faire une expérience qui, comme toute expérience originale, représente un effort dans la mesure où elle emmène le sujet aveugle dans des régions d’obscurité complète.


36. SINGULARITE

La singularité est un nom du sujet sans nom.


37. PERTE DE SOI

Le sujet de la démocratie doit se lier avec l’impossible, avec l’impossibilité de la subjectivité et de la démocratie. Il pactise avec l’autorité de son dépassement. Il s’ouvre à l’excès de la perte de soi.


38. PHILOSOPHIE

Le sujet philosophique est le sujet d’une auto-accélération déterritorialisante d’un sujet qui n’est presque plus un sujet.


39. SUJET DE LA DEMOCRATIE

Le sujet de la démocratie est quelque chose d’essentiellement autre qu’un non-sujet démocratisé. Il n’est pour ainsi dire qu’opposition à sa démocratisation.


40. VISAGE

Le sujet détériore sa subjectivité et provient d’elle. Il revient à lui-même sans se reconnaître car il est devenu anonyme, il n’a plus de visage. Comme une sorte de fantôme, il varie les modalités de son apparence, il en change les routes, chevauche la ligne de sa virtualité de haut en bas.


41. DIEU

Dieu est mort. L’homme ou le sujet doit décider et agir. La responsabilité du sujet est INDIVISIBLE et ABSOLUE. Agir librement signifie : manier de manière responsable sa responsabilité, c'est-à-dire sa liberté. Il n’y a pas de morale contraignante, pas de règles assurées, pas de lois inébranlables à partir desquelles le sujet pourrait s’orienter, s’il veut être responsable. Le sujet doit se donner sa propre loi, il est, comme le dit Sartre, condamné à être responsable. Il est condamné à être responsable de tout ce qu’il fait.


42. AUTO-APAISEMENT

La démocratie est ce qui reporte à l’infini l’auto-apaisement de la bonne conscience démographique et contribue ainsi à l’entraver. Elle est l’auto-dépassement de toutes les institutions et de toutes les structures qui répondent à cette volonté d’apaisement.


43. NIHILISME

Le nihilisme est la religion du négatif, “ religion des faibles ”, des mauvais sentiments, de la dépression et de la peur.


44. AMOUR

Aimer signifie devenir fou, partir dans le désert d’une instabilité valide et affirmer ce déplacement de L'OASIS DE LA RAISON au DESERT DE LA DERAISON en tant que sa vérité, en tant qu’un événement-vérité. Le moment de la katastrophé (du répit, de la folie, etc.) est le moment de son assentiment par le sujet de l’amour, qui se (re)connaît dans sa folie constitutive.


45. DECONSTRUCTION DE SOI

La déconstruction de soi du sujet n’est peut-être rien d’autre que la subjectivité même de ce sujet.


46. GRANDE POLITIQUE

La grande politique est une sorte de phantasme de Nietzsche. Au nom de cette politique et, au nom de ce qu’elle se doit d’être, Nietzsche combat la religion et sa morale du jugement et de la condamnation, la logique de la punition, la dictature du tribunal. La politique de Nietzsche veut être le commencement d’une politique qui va au-delà du narcissisme et de la punition. Elle est politique de liberté et de dépense de soi du sujet fini.


47. SUBJECTIVITE

La subjectivité du sujet est dans la pensée traditionnelle l’être du sujet. Au nom de la subjectivité, au nom de son nom, le sujet est sujet.


48. VOLONTE DE PUISSANCE

La volonté de puissance est volonté de responsabilité et de liberté, un hyperbolisme. Elle irrite le sujet, le fait exploser. L’explosion continuelle est appelée devenir par Nietzsche.


49. AIMER

Aimer veut dire tenir aux dangers d’une INCERTITUDE ONTOLOGIQUE, qui saisit l’être des amants.


50. ELEVATION DE SOI

Le sujet de l’élévation de soi n’a de cesse de se protéger contre sa réduction au simple statut d’objet. Il se défend contre le devenir chose ou la chosification de son être par l’institution historique de mouvements, de sens et de valeurs.


51. SUJET POLITIQUE

Le sujet politique est sujet de la folie, agent de quelque chose qui le dépasse et, qui lui réclame de faire le presque impossible. Cela agit, sans pouvoir assurer la raison et le telos de son action. Il risque l’aveuglement essentiel et structurel, qui singularise tous ces mouvements.


52. AMOR FATI

L’amor fati de Nietzsche est la formule d’un accord. Aimer son destin au sens nietzschéen ne signifie pas croire en son destin. Au contraire, l’amour du destin nietzschéen combat la croyance au destin.


53. LIBERTE

La liberté n’est pensable qu’infinie. La liberté est liberté atomique, elle est indivisible, totale et absolue.


54. SOUVERAINETE

La souveraineté est celle d’un sujet objectivement non souverain. La volonté de souveraineté est condition de possibilité de la responsabilité.


55. SINGULARITE

La singularité est un SUJET D'EXAGERATION CONTINUELLE DE SOI. Elle est SUJET HYPERBOLIQUE des limites propres. Sujet d’une irritation continuelle de soi et de l’accélération de soi vers la limite, autre nom de son ANONYMAT, de sa LIBERTE et de sa RESPONSABILITE.


56. SUJET HYPERBOLIQUE

Le sujet de la responsabilité est un sujet hyperbolique. C’est le sujet d’une accélération de soi et d’une exagération.


57. RESPONSABILITE

Il n’y a responsabilité que seulement comme événement excédentaire et comme excès.


58. SUJET DU NIHILISME

Le sujet du nihilisme ne veut plus devoir vouloir, être responsable. Il veut que d’autres veuillent pour lui. Il se soumet à la volonté d’autrui afin de paraître à plaindre, faible.


59. L'INDECIDABILITE

L’indécidabilité est ce qui expose le sujet d’une responsabilité démesurée. Par rapport à l’indécidabilité, la question de la démocratie acquiert une force explosive propre qui la lie nécessairement à la question de la liberté, de la responsabilité et décision.


60. AVEUGLEMENT

La question de l’aveuglement n’est pas une question parmi d’autres. Elle touche au problème d’une impuissance constitutive ou transcendantale, en tant qu’elle appartient au sujet comme tel. Le sujet est toujours dépassé par l’invisible.


61. ABIME DE LA DECISION

La liberté de décision est en même temps l’abîme de la décision. Schelling, Kierkegaard, Heidegger, Sartre et d’autres l’ont formulé ainsi. Être libre signifie être abyssal, être sans sol et sans fondement.


62. DIAPHORA

L’espace de la vérité, de la diaphora, de l’indifférenciabilité, du chaos, est l’espace d’une folie irréductible, primordiale à laquelle le sujet est originellement abandonné.


63. AMOUR DU DESTIN

Le sujet de l’amour du destin aime le réel comme destin, sans être croyant en celui-ci. Il est en accord avec sa situation et la réalité.


64. SARTRE

La philosophie sartrienne est une philosophie de la liberté et de la responsabilité entière. C’est une philosophie de la force. En pensant l’homme dans sa responsabilité, elle le respecte. Elle est philosophie éthique. Elle méprise la morale. Elle exige du sujet qu’il se surmène face à l’histoire dans l’ici-et-maintenant de sa situation politique, sociale, culturelle, etc. Il faut que ce sujet dépasse sa SITUATION FACTUELLE, c'est-à-dire qu’il se dépasse lui-même en tant que sujet de cette situation sans ignorer la FACTICITÉ du RÉEL. Le sujet a la faculté de transcender, de percer ce qui n’est que factuel. Il dépasse ce qui le détermine.


65. L'HYPERBOLE

L’hyperbolé coopère avec la catastrophe. Elle excite le sujet à l’auto-élévation exagérée, au collapse de son identité établie et reconnue. Être sujet veut dire s’abandonner au risque de cette auto-excitation, de ne jamais exclure au moins la violence de l’auto-excitation hyperbolique.


66. CREATIO EX NIHILO

En faisant de la creatio ex nihilo le thème central de l’éthique psychanalytique, Lacan souligne le fait, que nous sommes, dans cette perspective, tous des héritiers de Nietzsche et de Freud, que Dieu est mort, qu’une certaine liberté ou autonomie, difficile à supporter, est le destin des êtres humains modernes.


67. SOLITUDE

Le sujet est seul, réduit à ses propres moyens, comme on dit. Il se constitue comme sujet dans l’expérience d’une solitude fondamentale, qui lui interdit toute assurance communicative et toute attache (religio) à un système de reconnaissance, de foi, de fidélité et culpabilité.


68. SUJET

Le sujet, c’est l’autorité au sein de l’imprévisible. Il saisit le soi comme autorité dans la contingence.



69. ETHIQUE DE LA LIBERTE

L’éthique de la liberté est une éthique de la subjectivité libre, responsable et passionnée. Elle respecte l’autre en tant que sujet. Elle tient en estime sa liberté, c'est-à-dire sa subjectivité. Elle aime chez l’autre son désir d’être libre et d’être responsable pour soi et pour les autres. Elle apporte son soutien à l’autre sujet dans les moments de détresse, d’impuissance et de faiblesse. Elle est solidaire des faibles, des délaissés, des humiliés et des dépossédés. Mais elle n’est à aucun moment solidaire de l’impuissance et de la faiblesse elles-mêmes. Le sujet de la responsabilité combat faiblesse et impuissance.


70. VALEURS

Les valeurs sont des idées et des idéaux. Elles n’existent que comme écorce vide. Elles sont des impératifs qui tentent d’exhorter le sujet du nihilisme.


71. DOXA

La DOXA est le mot pour une OPINION, qui n’est pas une vérité. La doxa est aussi le nom du simple intérêt.



72. MUTATION

Le sujet reste sujet du changement, du devenir, d’une certaine destinée, d’un événement, d’une mutation toujours aussi gênante.


73. RESPONSABILITE

La responsabilité est le dépassement de soi. La responsabilité est tout comme la philosophie, un désir. Elle est un amour absolu, une passion absolue. Elle est catastrophe et dépassement.


74. VERITE-FAIT

Une vérité-fait n’a pas d’autre but que celui d’handicaper la vérité. C’est pourquoi le sujet d’une vérité-fait est sujet du CYNISME, de la DEPRESSION, du NARCISSISME et de sa LARMOYANCE PLAINTIVE.


75. SUJET SANS DIEU

Le sujet sans Dieu doit prendre le risque d’une certaine vitesse et de l’accélération de soi, l’imprévisibilité d’une découverte de soi impuissante, qui lui ôte ses certitudes et ses garanties. Il traverse l’espace des probabilités afin de faire l’improbable au seuil de l’impossible. Il constitue une nouvelle réalité, détournée de Dieu.


76. DEMOCRATIE

La démocratie n’existe qu’au-delà de la bonne et de la mauvaise conscience


77. NON-IDENTIQUE

Le non-identique est un autre nom pour l’abîme de l’amour. L’amour est essentiellement sans abîme, sans fond. Il ébranle le système des raisons et laissent advenir une sorte de couple-sujet, les singularités abyssales de la communauté-amour.


78. IDEAL

La seule attitude adéquate face à l’idéal de la démocratie serait le refus de cet idéal. Peut-être la démocratie n’est-elle pas du tout un idéal.


79. TRIBUNAL

La morale de l’ajournement de la souveraineté et de la conscience de soi est une morale de la culpabilité, une morale où l’on se rend coupable à l’infini, une morale du tribunal, telle que Deleuze, suivant Artaud et Nietzsche, la nomme. Le tribunal condamne le sujet à être coupable de manière irréversible, et ce à perpétuité.


80. MAUVAIS CHOIX

Le mauvais choix, c’est celui de la servitude. Il se prononce contre la décision, contre la condition de possibilité de la décision en s’opposant à la liberté et à la volonté de liberté. Il sélectionne les options, ordonne les offres. Il se soumet. Il est l’expression d’une peur, d’une indolence, d’une passivité ou d’une indifférence.


81. SUJET DEMOCRATISE

Le sujet démocratisé est le sujet de son désamorçage policier. Il est le sujet du droit. Un sujet prédéfini, socio-politiquement codifié, de l’ordre policier post-démocratique. Il est ce qui reste du sujet de la démocratie au terme de sa juridicisation ou de sa démocratisation. Il est la part non-énergétique et fonctionnelle du sujet, réduite à son statut d’objet : une sorte de reste dé-politisé, étatisé.


82. MACHINE CAPITALISTE

La machine capitaliste produit aujourd’hui l’absence de courage. Elle prescrit au sujet ce qu’il doit désirer. Elle ôte au sujet sa volonté, son désir, sa liberté et sa responsabilité. En contrôlant son désir, elle fonde la passivité du sujet en tant que récepteur-de-décisions.


83. CONSOMMATION

Il n’existe pas de consommation active. Le sujet devient contrôlable dans l’objectivité du consommateur. Il est discipliné, calmé, anesthésié et tranquillisé. Le sujet du capitalisme en tant que sujet-récepteur est un sujet limité, réduit à sa capacité de consommation. Il ne décide pas de lui-même puisqu’il se prononce pour les décisions d’autrui. Ses décisions sont des synthèses passives. Les intérêts du capital les préfigurent.


84. RESPECT

Pour le sujet de la responsabilité, il s’agit toujours de se respecter soi-même et de respecter les autres dans leur capacité de décider EUX-MEMES. La philosophie de la responsabilité est une philosophie du respect entier.


85. SUJET DE L'AMOUR

Le sujet de l’amour catastrophique affirme ce qu’il dépasse, ce qui semble être, plus ou moins, ce qu’il est. Il aime l’autre dans son altérité incommensurable. Il n’y a amour que comme amour d’autrui. C’est pourquoi cela exige du sujet cette sorte d’avancée hyperbolique, téméraire. Le sujet catastrophique de l’amour est sujet d’un dépassement empressé de soi. Il est devenir en tant que tel.


86. POLITIQUE DE LA VERITE

La politique de la vérité, de l’indécidable, pousse le sujet à dépasser ses limites. Elle exige du sujet qu’il se surpasse. Elle est la politique hyperbolique de l’abstention. Cette abstention propulse le sujet au-delà de son statut officialisé, démocratisé.


87. L'EVIDENCE DE L'ART

L’ART N'EST PAS EVIDENT. L’art manque de toute évidence de faits. L’art doit produire, défendre et affirmer une autre évidence. L’évidence de l’art repose dans son CONTACT AVEC LE REEL. Le réel est le nom pour ce qui n’appartient pas à l’espace des faits. Le réel nomme la frontière et l’extériorité constitutive de cet espace. Le réel n’est pas la réalité.


88. AUTRUI

Autrui m’engage en tant que sujet à être sujet pour lui et pour moi, c'est-à-dire à être libre. La liberté d’autrui doit également être la finalité de mon désir de liberté. En voulant être libre et responsable, je veux qu’autrui puisse être libre et responsable. Le sujet de la responsabilité veut une RESPONSABILITÉ ENTIÈRE. Il veut que chaque sujet saisisse dans sa singularité la possibilité de liberté et de responsabilité.


89. ETRANGETE

L’expérience de l'étrangeté n’est rien d’autre que l’expérience démocratique par excellence.


90. INQUIETUDE

Le sujet de la démocratie est sujet d’inquiétude. A la différence de la critique, l’inquiétude est affirmative, positive. Au cœur de la critique, il y a cet accord originel avec l’objet, sans que l’inquiétude ne s’assimile pour autant à l’objet de son inquiétude. L’inquiétude maintient son sujet dans une dimension sur laquelle aucune critique et aucune négativité n’ont de prise. Le sujet de la démocratie garde ce contact soucieux et toujours excessif avec le non-démocratique, une sphère donc dans laquelle la possibilité, la légitimité et l’efficience de l’objection critique, du dialogue et de l’explication dialogique n’existent plus.



91. DECISION VERITABLE

Dans l’instant de la décision véritable, le sujet sort de l’histoire et se manifeste comme sujet absolu. Il se survole.


92. SUJET DU CAPITALISME

Le sujet du capitalisme ne prend aucune responsabilité, il ne doit prendre aucune responsabilité. On attend de lui qu’il remplisse son rôle. Il doit consommer. Il ne désire même pas ce qu’il consomme. Il ne désire rien d’autre que son désir, que la passivité d’un désir presque indifférent à l’égard de ce qu’il désire pourvu que ce soit NEUF.


93. DEMOCRATICITE

La souveraineté de la démocratie, sa démocraticité, pourrait résider dans « l’acceptance » ou l’accès à ce qui l’inquiète et la menace le plus. La démocratie ne serait à aucun moment de nature à rassurer. A aucun moment, le sujet de la démocratie ne jouirait de la certitude narcissique courante de ceux qui sont du “ bon côté ” pour se battre pour la “ bonne cause ”.


94. RESPONSABILITE

La responsabilité ne peut être pensée qu’en tant que dépassement de soi : le sujet saisit au-delà de soi. Cette saisie au-delà de soi constitue son moi. La responsabilité est responsabilité de soi. En aucun cas, elle n’est anonyme.


95. REGISTRE DES FAITS

La philosophie et l’art n’affirment aucun fait. Ils constituent les vérités qui corrompent l’ordre des faits. Le lieu de la vérité ne peut être celui de l’univers des faits. C’est l’utopisme de la vérité, vérité folle en tant que telle. Elle fait exploser le registre des faits.


96. EXPERIENCE DEMOCRATIQUE

C’est l’expérience même du sujet et de la démocratie: l’expérience de ce qui diffère infiniment l’inclusion de soi d’une structure. Le sujet est exclusivement sujet lorsqu’il fait l’expérience de ce qu’il empêche et qu’il intègre cette expérience dans sa compréhension de soi.


97. ETHIQUE NIHILISTE

L’éthique nihiliste est l’éthique des dépressifs, de ceux qui perçoivent la vie comme un malheur, qui sont sans espoir et sans confiance. L’unique espoir des dépressifs est l’après-vie. Le dépressif espère la mort et son après.


98. CONQUETE

Le sujet prend des responsabilités face à sa liberté et pour sa liberté de responsabilité. Il s’engage envers lui-même. L’engagement envers soi-même implique un certain degré d’autorisation. Le sujet de la responsabilité s’autorise à être libre et responsable. La responsabilité est une conquête. Elle n’est pas un diktat de Dieu. Elle n’obéit pas à l’appel de la conscience. Elle passe outre Dieu, la conscience, la morale et la théologie pour n’être responsable qu’envers elle-même.


99. AUTO-VIOLENCE

Le sujet responsable (révolutif, hyperbolique) dirige la violence de la responsabilité toujours (d’abord) contre lui-même. Il (re)constitue ou affirme sa subjectivité dans l’acte de cette exigence auto-affectante. Dans ce sens, pour reprendre les termes de Slavoj Zizek, ” la violence devrait en premier lieu être conçue comme violence-de-soi, comme un remaniement violent de la substance de l’être du sujet. ”


100. ART

L’art est affirmation de forme.


101. PHILOSOPHIE

Philosophie est affirmation de vErité


102. POLITIQUE

Politique est affirmation d’intérêt


103. L'EXAMEN DE LA NON-RAISON

La démocratie n’existe qu’en tant que positivité d’une inquiétude non-critique en ce qui concerne le contact avec la dimension du non-démocratique dans lequel la raison reste livrée à l’examen de la non-raison.


104. VERITE

La vérité n’est pas fondée par l’art et par la philosophie. La vérité se laisse seulement affirmer. La vérité ne peut être fondée. La vérité se manifeste lorsque le sujet se détache de l’ordre symbolique, de son intégrité socioculturelle aussi bien que des fantasmagories de l’imaginaire. Il y a vérité au moment où la philosophie et l’art (au côté d’autres formes d’affirmation, la science par exemple) touchent à l’impossible (la virtualité pure ou le chaos) prenant ainsi le risque du dépassement d’horizon.