Katinka Bock
T-toxic
27 Apr - 15 Jun 2019
KATINKA BOCK
T-toxic
27 April - 15 June 2019
Puis, elle s’épanche, mourante,
En un fot de triste langueur,
Qui par une pente invisible
Descend jusqu’au fond de mon coeur
(Le jet d’eau, Galanteries, Charles Baudelaire)
Chère Katinka,
Je te remercie pour ces quelques lignes qui introduisent ta quatrième exposition à la Galerie Wolff.
Dès notre arrivée, Ahab’s sister nous accueille sans nous faire face, mais nous dévoilant seulement son profl. Elle tourne le dos au couple Frida und Friedrich, ces céramiques posées en équilibre l’une sur l’autre qui s’avèrent être des faux-amis. Cette pièce me rappelle Zucker und Salz. Une apparence presque jumelle mais trompeuse. Dans la fnalité, le goût compte autant que la fnesse du grain.
Tu crées un environnement fottant et brumeux dans l’exposition en utilisant un flet. Il ouvre l’exposition comme il ouvre la parenthèse de T-toxic. Au bout de l’espace, il revient pour fermer la parenthèse. Il me rappelle un autre médium que tu as souvent utilisé dans ton travail, la grille.
Deux matières différentes qui constituent une même conception: la délimitation d’un espace à travers lequel on peut voir de l’autre côté. Une trame qui forme une empreinte à la surface des objets comme une peau reptilienne.
La frontière et les limites qui défnissent un espace, le dehors et le dedans, le pas de côté sont autant de manière de se confronter à un espace physique. Mais il y a aussi l’autre, les autres. Tu visites inlassablement cette position de l’Homme dans l’espace, son appartenance à un groupe, ou sa solitude.
Dans cette lignée de relation à l’autre, il est parfois question de contamination. Cela peut se faire par des moyens naturels mais invisibles encore. Seulement dans une seconde vie et par le déplacement d’un lieu à l’autre, cet enregistrement apparaît, c’est le cas avec For your Eyes only, Glasgow. Cette empreinte sur tissu bleu suspendue dans l’espace marque le passage du soleil et de la pluie, évoquant presque une mémoire photographique. Réalisée sur le toit de l’espace Common Guild à Glasgow, il a sauvegardé un temps Ecossais pendant quelques mois pour ensuite débarquer à Paris.
Le corps se trouve partout dans l’exposition, par fragments souvent allusifs. Par exemple, Sculpture du soir (with One of Hundred, Palermo), nous met face à une paire de jambes se reposant sur un mur. Il nous manque tout de même un morceau de l’histoire, un pied en bois manque.
Certes nous avons perdu un pied, mais nous avons retrouvé toutes ses chaussettes dépareillées. Histoire commune à tout un chacun, accepter de faire la collection de chaussettes perdues. Le corps devient asymétrique mais garde son équilibre. Debout ou allongé, vertical ou horizontal, il reste les parties du corps les plus exposées – les plus vulnérables – comme mains et pieds. Ces extrémités sans lesquels le corps peut diffcilement fouler le sol, manipuler les matières et les surfaces.
April table perce une faille dans le climat sec de l’exposition: La pluie récupérée et déviée par un tube en cuivre crée une avalanche et l’érosion du tas de sable. Le mouvement, c’est aussi celui qui hésite et reste fgé comme ces deux lettres en céramique prise dans le mur, ou, le passage du majuscule au minuscule, du « D » au « d », du doute à la décision.
Encore une fois avec ton travail, il ne faut pas foncer tête baissée, il faut douter, tourner sur soi-même, lever les yeux, glisser entre les formes, plonger dans les matières, dans les contenus et dans les contenants, comme une cuillère qui reçoit pour mieux donner.
Tu évoques la toxicité que l’on retrouve dans l’environnement, dans notre consommation, et aussi je crois, dans des possibles relations humaines.
Elle se crée dans la rencontre entre les matières, organiques ou inorganiques, elle pose la question du vivant et de sa transformation.
Autant que quand tu provoques la rencontre entre le cuir et le citron, le bronze et le bois, le verre et le métal, le cuivre et l’eau. Des matériaux qui ont pour certains, la propriété de se transformer avec le temps et la relation.
La toxicité, c’est eux, c’est vous, c’est nous, c’est moi.
Sandrine Djerouet et Katinka Bock
T-toxic
27 April - 15 June 2019
Puis, elle s’épanche, mourante,
En un fot de triste langueur,
Qui par une pente invisible
Descend jusqu’au fond de mon coeur
(Le jet d’eau, Galanteries, Charles Baudelaire)
Chère Katinka,
Je te remercie pour ces quelques lignes qui introduisent ta quatrième exposition à la Galerie Wolff.
Dès notre arrivée, Ahab’s sister nous accueille sans nous faire face, mais nous dévoilant seulement son profl. Elle tourne le dos au couple Frida und Friedrich, ces céramiques posées en équilibre l’une sur l’autre qui s’avèrent être des faux-amis. Cette pièce me rappelle Zucker und Salz. Une apparence presque jumelle mais trompeuse. Dans la fnalité, le goût compte autant que la fnesse du grain.
Tu crées un environnement fottant et brumeux dans l’exposition en utilisant un flet. Il ouvre l’exposition comme il ouvre la parenthèse de T-toxic. Au bout de l’espace, il revient pour fermer la parenthèse. Il me rappelle un autre médium que tu as souvent utilisé dans ton travail, la grille.
Deux matières différentes qui constituent une même conception: la délimitation d’un espace à travers lequel on peut voir de l’autre côté. Une trame qui forme une empreinte à la surface des objets comme une peau reptilienne.
La frontière et les limites qui défnissent un espace, le dehors et le dedans, le pas de côté sont autant de manière de se confronter à un espace physique. Mais il y a aussi l’autre, les autres. Tu visites inlassablement cette position de l’Homme dans l’espace, son appartenance à un groupe, ou sa solitude.
Dans cette lignée de relation à l’autre, il est parfois question de contamination. Cela peut se faire par des moyens naturels mais invisibles encore. Seulement dans une seconde vie et par le déplacement d’un lieu à l’autre, cet enregistrement apparaît, c’est le cas avec For your Eyes only, Glasgow. Cette empreinte sur tissu bleu suspendue dans l’espace marque le passage du soleil et de la pluie, évoquant presque une mémoire photographique. Réalisée sur le toit de l’espace Common Guild à Glasgow, il a sauvegardé un temps Ecossais pendant quelques mois pour ensuite débarquer à Paris.
Le corps se trouve partout dans l’exposition, par fragments souvent allusifs. Par exemple, Sculpture du soir (with One of Hundred, Palermo), nous met face à une paire de jambes se reposant sur un mur. Il nous manque tout de même un morceau de l’histoire, un pied en bois manque.
Certes nous avons perdu un pied, mais nous avons retrouvé toutes ses chaussettes dépareillées. Histoire commune à tout un chacun, accepter de faire la collection de chaussettes perdues. Le corps devient asymétrique mais garde son équilibre. Debout ou allongé, vertical ou horizontal, il reste les parties du corps les plus exposées – les plus vulnérables – comme mains et pieds. Ces extrémités sans lesquels le corps peut diffcilement fouler le sol, manipuler les matières et les surfaces.
April table perce une faille dans le climat sec de l’exposition: La pluie récupérée et déviée par un tube en cuivre crée une avalanche et l’érosion du tas de sable. Le mouvement, c’est aussi celui qui hésite et reste fgé comme ces deux lettres en céramique prise dans le mur, ou, le passage du majuscule au minuscule, du « D » au « d », du doute à la décision.
Encore une fois avec ton travail, il ne faut pas foncer tête baissée, il faut douter, tourner sur soi-même, lever les yeux, glisser entre les formes, plonger dans les matières, dans les contenus et dans les contenants, comme une cuillère qui reçoit pour mieux donner.
Tu évoques la toxicité que l’on retrouve dans l’environnement, dans notre consommation, et aussi je crois, dans des possibles relations humaines.
Elle se crée dans la rencontre entre les matières, organiques ou inorganiques, elle pose la question du vivant et de sa transformation.
Autant que quand tu provoques la rencontre entre le cuir et le citron, le bronze et le bois, le verre et le métal, le cuivre et l’eau. Des matériaux qui ont pour certains, la propriété de se transformer avec le temps et la relation.
La toxicité, c’est eux, c’est vous, c’est nous, c’est moi.
Sandrine Djerouet et Katinka Bock