Aya Takano
06 May - 14 Jun 2008
AYA TAKANO
"Toward Eternity"
"Formée à l’art populaire du kawaii (mignon) en tant que dessinatrice pour la compagnie de jeux vidéos Nintendo, Aya Takano met en scène dans ses toiles de tout format des personnages androgynes aux grands yeux attendrissants et au corps longiligne dont les extrémités sont systématiquement rougies, en témoignage de leur extrême sensibilité. Au goût des japonais, son oeuvre est plastiquement irréprochable. Doublée d’une rapidité d’exécution exceptionnelle, sa maîtrise du dessin et de la couleur est telle que Takashi Murakami reconnaît en elle le génie de Hokusai, le peintre d’estampes du 18ème siècle. Ce qui fait la qualité du travail d’Aya Takano c’est aussi la richesse et la singularité de son univers pictural. Entraînée par son imagination débordante, elle exprime ses pensées quotidiennes sous la forme de petits dessins préparatoires légendés par une réflexion personnelle rédigée avec une sobriété et une poésie proche du traditionnel haïku. Fidèles à la pratique nippone de la customisation, les compositions fourmillent de détails. Les tatouages des personnages, les motifs de chaque tissu, et la qualité des bijoux et des ornements sont autant de prétextes pour introduire (à l’instar de son acolyte Mr.) le dessin dans le dessin. Toutes ces images sont ensuite réunies pour composer les sujets complexes de ses grandes toiles peintes à l’acrylique détrempée. Mais l’impression de douceur rendue par la légèreté de sa technique jure avec le caractère subversif de son œuvre. Le vernis du kawaii couvre souvent chez les artistes du groupe Kaikai Kiki la représentation de sujets controversés. Ainsi les peintures qu’elle exposait au Musée d’Art Contemporain de Lyon en 2006 montraient de manière crue la découverte jubilatoire de la sexualité par de jeunes geishas ; et la série d’oeuvres pour son exposition à la Galerie Emmanuel Perrotin Miami en 2007 avait pour thème les ordures, inspirée par la formation artificielle de l’île de Yume No Shima sur un monticule de déchets, dans la péninsule de Tokyo. L’artiste aborde pourtant ces sujets régressifs avec une fantaisie telle, que la perversité s’efface devant l’incongruité de ses mises en scène. Car Aya Takano vit dans un monde où les poulpes géants volent au milieu des buildings et certains personnages sont marqués de deux pois bleus sur les fesses alors que d’autres abritent des oiseaux sur leur tête comme on porte un chapeau. Autant de symboles récurrents dont le sens nous échappe. Et c’est enfin ce qui fait le charme de son vocabulaire plastique original dans le circuit fermé de l’art contemporain : l’exotisme grisant d’une langue étrangère."
Texte de Raphaël Gatel
"Trained in the popular art form known as kawaii (cute) as an illustrator for Nintendo video games, Aya Takano portrays endearing, wide-eyed androgynous figures with slender bodies; their extremities are systematically reddened, as if to illustrate their extreme sensitivity. For the Japanese, her work is technically irreproachable. Her mastery of drawing and color, combined with her capacity to work exceptionally quickly, is so great that Takashi Murakami has compared her to the brilliant Hoskusai, the 18th-century painter and printmaker. What also contributes to the quality of Aya Takano’s work is the breadth and unique aspect of her pictorial world. Inspired by her vivid imagination, she expresses her everyday musings in the form of small preparatory drawings to which she adds her own texts, written with a purity and poetry that is evocative of traditional haiku. She is also an adept of the Japanese practice of customization, and her compositions teem with details. The tattoos on the figures, the patterns on each piece of fabric and the quality of the jewelry and accessories are all backdrops for introducing drawing into the drawing (like her acolyte, Mr.). All these images are then brought together to compose the complex subjects of her large acrylic canvases. But the impression of gentleness transmitted by her light touch jars with the subversive nature of her work. For artists in the Kaikai Kiki group, the polish of the kawaii genre often provides a cover for the portrayal of controversial subjects. The paintings she exhibited in 2006 at Lyon’s Musée d’Art Contemporain, for example, bluntly illustrated young geishas in the exhilarating throes of budding sexuality. And “garbage” was the theme for her series of works in progress for the exhibition at the Galerie Emmanual Perrotin Miami in 2007, a subject inspired by the artificial creation of Yume No Shima Island atop a heap of trash in Tokyo Bay. Yet the artist takes on these regressive subjects with such a sense of whimsy that the perversity evaporates in the face of these incongruous compositions. Because Aya Takano lives in a world where giant squid fly among building and figures are stamped with two blue dots on their backsides, while others carry birds on their heads, like hats. The meaning of all these recurring symbols is elusive. And ultimately, this is the charm of her visual vocabulary, which is unique in the closed world of contemporary art: the heady exoticism of a foreign language."
"Toward Eternity"
"Formée à l’art populaire du kawaii (mignon) en tant que dessinatrice pour la compagnie de jeux vidéos Nintendo, Aya Takano met en scène dans ses toiles de tout format des personnages androgynes aux grands yeux attendrissants et au corps longiligne dont les extrémités sont systématiquement rougies, en témoignage de leur extrême sensibilité. Au goût des japonais, son oeuvre est plastiquement irréprochable. Doublée d’une rapidité d’exécution exceptionnelle, sa maîtrise du dessin et de la couleur est telle que Takashi Murakami reconnaît en elle le génie de Hokusai, le peintre d’estampes du 18ème siècle. Ce qui fait la qualité du travail d’Aya Takano c’est aussi la richesse et la singularité de son univers pictural. Entraînée par son imagination débordante, elle exprime ses pensées quotidiennes sous la forme de petits dessins préparatoires légendés par une réflexion personnelle rédigée avec une sobriété et une poésie proche du traditionnel haïku. Fidèles à la pratique nippone de la customisation, les compositions fourmillent de détails. Les tatouages des personnages, les motifs de chaque tissu, et la qualité des bijoux et des ornements sont autant de prétextes pour introduire (à l’instar de son acolyte Mr.) le dessin dans le dessin. Toutes ces images sont ensuite réunies pour composer les sujets complexes de ses grandes toiles peintes à l’acrylique détrempée. Mais l’impression de douceur rendue par la légèreté de sa technique jure avec le caractère subversif de son œuvre. Le vernis du kawaii couvre souvent chez les artistes du groupe Kaikai Kiki la représentation de sujets controversés. Ainsi les peintures qu’elle exposait au Musée d’Art Contemporain de Lyon en 2006 montraient de manière crue la découverte jubilatoire de la sexualité par de jeunes geishas ; et la série d’oeuvres pour son exposition à la Galerie Emmanuel Perrotin Miami en 2007 avait pour thème les ordures, inspirée par la formation artificielle de l’île de Yume No Shima sur un monticule de déchets, dans la péninsule de Tokyo. L’artiste aborde pourtant ces sujets régressifs avec une fantaisie telle, que la perversité s’efface devant l’incongruité de ses mises en scène. Car Aya Takano vit dans un monde où les poulpes géants volent au milieu des buildings et certains personnages sont marqués de deux pois bleus sur les fesses alors que d’autres abritent des oiseaux sur leur tête comme on porte un chapeau. Autant de symboles récurrents dont le sens nous échappe. Et c’est enfin ce qui fait le charme de son vocabulaire plastique original dans le circuit fermé de l’art contemporain : l’exotisme grisant d’une langue étrangère."
Texte de Raphaël Gatel
"Trained in the popular art form known as kawaii (cute) as an illustrator for Nintendo video games, Aya Takano portrays endearing, wide-eyed androgynous figures with slender bodies; their extremities are systematically reddened, as if to illustrate their extreme sensitivity. For the Japanese, her work is technically irreproachable. Her mastery of drawing and color, combined with her capacity to work exceptionally quickly, is so great that Takashi Murakami has compared her to the brilliant Hoskusai, the 18th-century painter and printmaker. What also contributes to the quality of Aya Takano’s work is the breadth and unique aspect of her pictorial world. Inspired by her vivid imagination, she expresses her everyday musings in the form of small preparatory drawings to which she adds her own texts, written with a purity and poetry that is evocative of traditional haiku. She is also an adept of the Japanese practice of customization, and her compositions teem with details. The tattoos on the figures, the patterns on each piece of fabric and the quality of the jewelry and accessories are all backdrops for introducing drawing into the drawing (like her acolyte, Mr.). All these images are then brought together to compose the complex subjects of her large acrylic canvases. But the impression of gentleness transmitted by her light touch jars with the subversive nature of her work. For artists in the Kaikai Kiki group, the polish of the kawaii genre often provides a cover for the portrayal of controversial subjects. The paintings she exhibited in 2006 at Lyon’s Musée d’Art Contemporain, for example, bluntly illustrated young geishas in the exhilarating throes of budding sexuality. And “garbage” was the theme for her series of works in progress for the exhibition at the Galerie Emmanual Perrotin Miami in 2007, a subject inspired by the artificial creation of Yume No Shima Island atop a heap of trash in Tokyo Bay. Yet the artist takes on these regressive subjects with such a sense of whimsy that the perversity evaporates in the face of these incongruous compositions. Because Aya Takano lives in a world where giant squid fly among building and figures are stamped with two blue dots on their backsides, while others carry birds on their heads, like hats. The meaning of all these recurring symbols is elusive. And ultimately, this is the charm of her visual vocabulary, which is unique in the closed world of contemporary art: the heady exoticism of a foreign language."